mercredi 14 mai 2008

Broadway et Hollywood

Coucou,

West Side Story est une comédie musicale de Leonard Bernstein et Stephen Sondheim jouée pour la première fois en 1957 à Broadway. C'est aussi un film réalisé par Robert Wise et Jerome Robbins (qui signait déjà les chorégraphies de la version sur scène) sorti en 1961. Un film qui a gagné 10 Oscars, ce qui est impressionnant et un peu exagéré quand même, il ne devait rien y avoir de transcendant au cinéma cette année. D'ailleurs une rapide vérification le confirme à peu près (il y avait La Dolce Vita, quand même).

JetsLes Jets claquent des doigts parce que c'est viril

Ce qui est amusant, c'est qu'il y a pas mal de différences entre la comédie musicale et le film. Le principal est l'ordre de quelques chansons. Sur scène, on a tenté d'avoir des actes à peu près équilibrés : le premier se termine après la bagarre, le deuxième c'est la découverte des décès et les conséquences. Dans le film, la bagarre arrive très près de la fin, pour être une sorte de point culminant de l'action (la dernière partie du film est d'ailleurs assez lente et un peu barbante il faut bien le dire).

BernardoBernardo a astucieusement choisi un mur rouge pour mettre en valeur sa chemise rouge

Quelles sont les chansons qui ont bougé ? Les chansons gaies qui étaient dans le deuxième acte, et tout particulièrement I Feel Pretty et Gee Officer Krupke. Inversement, Cool est passé d'avant la bagarre (sur scène) à après (au cinéma).

Ce qui n'est pas sans incidence ! Il y a des détails « pratiques » : c'est Riff qui « mène » Cool sur scène, mais dans le film au moment où la chanson arrive il est déjà mort, et c'est Ice qui le remplace. Ice, qui sur scène s'appelait Diesel. Vous suivez toujours ?

Pour équilibrer... et rester cohérent avec le fait que c'est Riff le chef des Jets, c'est lui qui mène Gee Officer Krupke (alors que c'est Action sur scène). Beh oui il est encore vivant donc il peut chanter, le chef !

I Feel PrettyMiss America, bravo, speech!

Les changements d'ordre ont également rendues nécessaires des adaptations de paroles, principalement pour I Feel Pretty. Sur scène, la chanson était chantée de nuit (après la bagarre mais avant qu'elle n'apprenne ce qui s'y est passé) dans la chambre de Maria, et on l'entendait dire « I feel pretty and witty and bright, and I pity any girl who isn't me tonight. » Mais au cinéma, elle chante le jour dans le magasin et prononce les paroles bien connues « I feel pretty and witty and gay, and I pity any girl who isn't me today. » Ce qui a permis au père de Chandler de reprendre cette chanson dans son spectacle à Las Vegas, comme vous ne l'ignorez probablement pas.

Dernières conséquences de ces changements d'ordre : l'interprétation des paroles n'est plus du tout la même. Autant je dois dire que Cool prend pour moi beaucoup plus de sens après le combat, autant je dois dire que je suis déçu que le côté second degré voire cynique ou désespéré de I Feel pretty et de Gee Officer Krupke est complètement perdu, on se retrouve dans une interprétation très terre à terre. C'est cohérent, certes, mais on perd un peu en originalité.

Il y a d'autres changements qui sont là pour des raisons de correction politique (faut faire politique correct, quoi). Je pense tout particulièrement aux paroles de America. Il y a un très chouette site qui permet de les lire en version scène et cinéma. Les deux chansons n'ont presque plus rien à voir ! Sur scène, on a droit à un duo (duel ?) entre Anita, qui vante les joies du rêve et américain et critique assez durement la vie à Porto Rico, et Rosalia qui a gardé un souvenir nettement plus positif de l'île de ses origines... Au cinéma, le duo se fait entre Anita et Bernardo, et cette fois-ci Anita vante toujours les mérites de la vie aux États-Unis mais ne dresse pas de portrait aussi noir de San Juan... Par contre Bernardo critique vivement New York et le racisme ambiant. Petit exemple :

Sur scène :

ROSALIA: I'll drive a Buick through San Juan. ANITA: If there's a road you can drive on.

Au cinéma :

ANITA: Buying on credit is so nice. BERNARDO: One look at us and they charge twice.

AmericaAmerica au cinéma : les filles d'un côté, les garçons de l'autre

Parmi les autres différences, on notera bien sûr la distribution : la plupart des acteurs de Broadway n'ont pas pu reprendre leur rôle à Hollywood, alors qu'ils savaient chanter et danser, eux. Mais voilà au cinéma il faut des stars, et même si Natalie Wood ne sait pas bien chanter et a dû être doublée par Marnie Nixon,c e n'est pas grave, on la prend quand même...

Je termine rapidement en citant les quatre passages que Jerome Robbins a eu le droit de réaliser avant de se faire virer du film : le prologue, Cool, I Feel Pretty et America. Il devait réaliser tous les numéros musicaux, mais était un peu trop maniaque pour la santé des acteurs (presque tous blessés à la suite du tournage de Cool) et les producteurs (presque ruinés avant de le virer).

Il y a encore plein de petites différences ici ou là, de trucs inversés (Tonight et America) ou de paroles changées car prononçables sur scène mais ne passant pas la censure au cinéma, mais je ne vais pas tout citer non plus !

9 commentaires:

Unknown a dit…

Tout ça me fait réaliser que je n'ai jamais vu la comédie musicale...Je suppose que tu dois avoir le DVD? Et que tu vas donc me le prêter? Le 24 mai?

Et sinon, merci qui pour avoir enfin vu le film?

Maxou a dit…

Coucou,

J'ai le DVD du film, pas de la comédie musicale. Ma sœur me l'a passé récemment (donné ?)... Elle n'avait même pas enlevé l'emballage plastique !

Je le lui rendrai quand elle me passera Ed Wood ou Sleepy Hollow.. ou un truc que je n'ai pas vu et qu'elle a acheté sans me le dire.

(PS : ouf enfin un commentaire !)

Unknown a dit…

mais moi aussi, j'ai le DVD du film....c'est celui de la comédie musicale qu'il me faut...
Et on a trouvé ça, une partition "Lilo Herrmann", de Paul Dessau : "Den Nacken frei vom straffen/kurzgeschnittnen Haar/die Brille vor den Augen./Im derben Leinenkleid/ein stämmig blondes Mädel./So kannten wir Dich, Lilo,/wenn Du als Chef mit Deinen Pionieren/am Sonntagmorgen ins Neckartal hinauszogst;/Lieder lehrtest Du sie, Schwimmen, Zelten,/und lehrtest sie auch Mut, Hilfsbereitschaft, Solidarität - Denn Du wusstest um unsre Sache."
Et c'est que le début...Ca ferait pas une magnifique comédie musicale ?

Anonyme a dit…

Salut,

Tu es mauvaise langue en disant qu'il n'y avait rien d'autre de bien en 1961, à part La Dolce Vita. N'as tu pas vu Audrey Hepburn dans Breakfast at Tiffany's de Blake Edwards ? Il y avait aussi Le Cid avec Chalton Heston, L'Arnaqueur avec Paul Newmann et Les 101 dalmatiens avec Pongo. Tout ça pour dire que West Side Story avait de la concurrence.

Maxou a dit…

Yannou : heu non je n'ai rien vu de tout ça... mais bon il faut bien trouver une explication aux dix Oscars de West Side Story, et même si c'est bien ça fait quand même un peu beaucoup...

Les 101 Dalmatiens avec Pongo... Il a loupé toutes les nominations, ce films... C'est curieux parce qu'avec du recul il est plutôt apprécié... C'était le premier Disney sans Walt si je ne me trompe pas ?

Salomé : je te laisse faire les chorés de ta comédie musicale... Mais après tout il y a eu La mélodie du bonheur à Salzbourg, pourquoi pas quelque chose dans la vallée du Neckar ?

Anonyme a dit…

Parmi tous les films cités, ayant vu seulement West Side Story et La Dolce Vita je peux dire que je les mettrais à niveau égal : j'ai autant dormi pour l'un que pour l'autre :-$ Oui, je suis bien moins résistante à la culture que les autres lecteurs de ce blog ...
(C'est pas Blanche-Neige le premier Walt Disney ?)

Maxou a dit…

Coucou,

Le premier long métrage de Disney, c'est Blanche Neige. Pour les 101 dalmatiens, je parlais d'un Disney sans Walt... nuance !

Et on a le droit de dormir, mais c'est dommage de le faire en même temps qu'on regarde West Side Story. Certes y a des passages un peu lents (comprendre « soporifiques ») mais il y a aussi des trucs très bien.

Anonyme a dit…

Désolée mais j'avais beaucoup de retard alors j'ai lu pleeeeein de notes d'un coup, c'est que tu es prolifique Maxou ! (je suis pardonnée là ? 0:-))
Sinon j'avais appris America en Anglais en 5e (la version film puisqu'il faut préciser) alors j'avais déjà vu un paquet de fois les scènes principales du film.
Et puis c'était quand je débutais ma vie de centralienne, j'avais beaucoup de sommeil en retard à l'époque. Tu m'en veux ?

Maxou a dit…

Mais bien sûr que non Camille je ne t'en veux pas ! Je suis presque triste que tu poses la question, tellement la réponse est évidente !